Les Tatas flingueuses

(Inspiré des Tontons flingueurs) version 04/20-0
6 personnages :
5 filles : La VM, la S. Hospitalier, la S. Secrétaire, la S. Trésorière, une Apprentie
un homme : le F. Servant

Sur scène, la VM est à son bureau. Sur le bureau, une bouteille de vin, du pain, du beurre, des bocaux de conserve, etc…
La S Hospitalier entre et dépose brutalement sur le bureau un gros sac lourd.

VM – Que m’apportes tu là, ma sœur Hospitalière ?

HOSP – Eh bien vous aviez raison, VM ! rien de tel qu’une tenue interob pour renflouer la caisse. Je vous rapporte le magot du tronc ! (Elle ouvre le sac qui déborde de biftons)

La VM plonge sa main dans le sac et en fait couler les billets et les pièces pour qu’on les voie bien. Toutes deux s’extasient…

VM – Tu as compté ?

HOSP – Un bon pacson ! (À son oreille) mais rassurez vous, j’en ai parlé à personne !

Du public se lèvent la S Trésorier et la S Secrétaire, furieuses.

TRES – Mais qu’est-ce qu’elles font ? (S’adressant à la Secrétaire) Tu étais au courant ?

SECR – Je te jure ! Je n’en ai pas eu communication !

(Elles courent dans les rangs du public et se dirigent vers la scène)

TRES – C’est moi le Trésorier. Je ne vais pas laisser faire !

(Elles tentent de monter sur la scène, à l’opposé du bureau, jusqu’à ce que le F Servant -reconnaissable à sa tenue – sorte des coulisses et les interpelle au bas des marches)

SERV – mes sœurs, regagnez vos places ?

TRES – (Brandissant un levier ou un outil métallique impressionnant) Dis donc, frère Servant, tu veux bien nous conduire au bureau de la VM ?

SECR – Il s’y passe des choses, et je crois qu’elle nous prend pour des connes !

SERV – (apeuré) Si mes SS veulent bien me suivre…

(Tous trois montent sur scène et se dirigent vers le bureau)

TRES – (faisant irruption) Bougez pas ! Les mains sur la table ! (Elle brandit son « arme ») On a des arguments !

SECR – (montrant un poing américain ou une lime à ongles, ou une fourchette, etc. dans une attitude de boxeur) Et on ne craint pas les attouchements !

(Dans leur dos, le F Servant brandit alors un long couteau de cuisine ou un rouleau à pâtisserie).

SERV – (reprenant la situation en main) Si mes Sœurs veulent bien déposer leurs métaux…

(Elles se retournent, déconfites)

Allons, vite ! On pourrait se méprendre sur la symbolique du grade ! Nous venons déjà de frôler l’incident.

La S Hospitalier leur présente un panier dans lequel les SS Trésorier et Secrétaire déposent leurs armes.

VM – (retenant sa colère) Vous savez ce que je devrais faire… rien que pour le principe ? (Elle fait le signe de les égorger)

SECRET – (effrayée ; s’adressant à la S Trésorier) Je te disais que cette démarche ne s’imposait pas ! (S’adressant à la VM, mielleuse) Au fond, maintenant, le débat d’idée pourrait prendre le pas sur la confrontation… Qu’est-ce que vous en pensez ?

VM – Je dis pas non (La VM, imperturbable, se prépare un sandwich)

TRES(l’observant, estomaquée) Dis donc, on n’est pas venu là pour beurrer des sandwichs !

SECR – (s’asseyant) Pourquoi pas ? les travaux de table ne sont pas sans noblesse (en s’asseyant, elle se rapproche du sac) Ceci constitue le premier pas vers des négociations fructueuses, hein ?

VM – (s’adressant à la S Trésorier restée debout, et lui tendant un couteau) Alors, tu es contre le travail opératif ?

TRES – (s’étant aperçue du jeu de la S Secret, prête à se saisir du sac, accepte le couteau et s’assoit) (faux-cul) C’est vrai, si on était plus opérative, on spéculerait moins de bêtises…

Une intruse, sœur apprentie, fait brusquement irruption.

Panique autour de la table !

VM – Qu’est-ce que tu veux ?

INTRUS – y’a plus de piles pour les chandelles à led !

VM – (s’adressant au Servant, qui est resté debout) Donne lui des bougies !

INTRUS – Mais j’en veux pas des bougies. Vous voulez foutre le feu ? (Mouvement de panique pour protéger les biftons) Les bougies, vous pouvez vous les foutre où je pense !

HOSP – (montrant les dents) La Véné te dit qu’on n’en a plus des bougies, c’est tout !

INTRUS – Bon ! (Voyant les biftons, elle tente d’y mettre la main)

HOSP – (lui saisit la main) Touche pas au grisbi !

INTRUS – (essayant de se saisir de la bouteille) Alors buvons !

VM – Touche pas à la poudre !

L’intruse sort, effrayée, mise dehors par le Servant.

SECR – trois ans à peine, et déjà ça veut picoler !

VM – C’est un scandale !

TRES – Nous, on est maître. Alors puisqu’on a l’âge, on pourrait s’en jeter un… non ?

(Elle prend la bouteille, regarde l’étiquette, déçue) Mais c’est la bibine du Servant !

SERV – (vexé) Elle est pas bonne ma bibine ?

VM – (au Servant) Allez ! sors-le-nous, ton vitriol !

Le Servant fait signe avec les doigts que ça coûte cher. La VM lui montre le sac.

VM – C’est bon, tu auras ta part !

Le Servant revient avec une autre belle bouteille et sert chacune.

Chacune regarde son verre avec appréhension.

SECR – (renifle) au premier abord, ça a l’air curieux…

Tous boivent et y vont de leur commentaire

HOSP – Faut reconnaître que c’est du brutal.

VM – Vous avez raison, c’est curieux.

TRES – (au Servant) Ah oui ! c’est pas ce que tu nous sers le soir en salle humide !

SECR – Faut admettre que c’est plutôt une boisson d’homme !

SERV – Il date de mon initiation…

SECR – Trente ans ! Ouah ! et en trente ans tu n’as pas vidé la bouteille ?

SERV – La dernière fois que j’en ai servi, deux frangins ont dû souffler dans le ballon : ils ont passé la nuit au violon, en dégrisement. Sans parler du PV !

HOSP – On n’avait personne dans la police pour les faire sauter ?

SERV – Ils étaient flics, tous les deux !

La griserie s’empare peu à peu de toutes

TRES – (inspiré) Tu sais ce qu’il me rappelle ?

VM – Cette espèce de gniole qu’on buvait chez les Frères du GO, chez ceux qui nous recevaient… avant le confinement…

TRES – Ah oui, comment elle s’appelait leur loge, putain ?

VM – j’sais plus, mais je me souviens bien du Véné…

TRES – Lulu ?

VM – Tu l’as connu ?

TRES – Tu parles…

HOSP – (n’écoutant pas la conversation entre la Véné la Trésorière) Moi j’y trouve un goût amer… de l’aloès.

SERV – Y’en a !

SECR – Tu vois pas qu’il nous charrie ?  Il n’est pas en train de nous ferait finir…

HOSP – quoi ? le calice d’amertume ? (Recrache et se met à chialer)

SECR – C’est ça ! (Elle se met aussi à chialer)

HOSP – (toujours en chialant) On nous fait avaler n’importe quoi !

VM – (toujours dans sa conversation avec la Trésorière) Et leur Grand-Expert… un Apollon…

TRES – Un peu long, oui ! mais un peu con aussi…

VM – De toutes façons, ils le sont tous ! (Changeant de sujet d’attention) Vous avez beau dire, y’a pas seulement de l’aloès ; y’a aut’chose… ça serait pas des fois…

(Un temps)

SECR – de la chloroquine ?

SERV – (stoïque) Y’en a aussi !

 

Toutes s’effondrent désespérées, soulées, tandis que le Servant, heureux du tour qu’il leur a joué se sauve en s’emparant des biftons.