“Aux Trois Frères”

(Adaptation de la Version originale d’un auteur Anonyme)
Dans un décor de bar, un barman essuie ces verres, nettoie le comptoir. Une pancarte indique le nom du troquet : « Aux Trois frères ».
Une affiche d’information rappelle que la vente d’alcool est interdite aux mineurs de moins de 3 ans. Le barman est seul derrière un comptoir et porte un tablier d’apprenti.

Barman : un bon bouleau que j’ai choppé, là, peinard, mais un milieu bizarre. Des cendriers en forme de crâne sur les tables… Déjà, quand j’ai dit au patron que je savais ni lire ni écrire, je pensais que ça allait le refroidir… C’est parfait, tu commences à midi, qu’il m’a dit ! Les horaires ? midi, minuit, pas une minute de plus ! Nous avons de bonnes nurses ici !
La clientèle doit être un peu… spéciale, si vous voyez ce que je veux dire : prends ce tablier, c’est ton outil de travail, qu’il m’a dit le patron. (Il montre le tablier) je ne m’attendais pas à devoir porter un cache-sexe. Relève la bavette, ça te protègera, qu’il a rajouté.
Un homme bien habillé rentre dans le bar, et vient se mettre au zinc. Arrivée depuis le public.
Barman – Bonsoir Monsieur, vous désirez quelque chose ?
Compagnon – J’attends mon maître …
Barman – Et un mètre un … (aligne les verres et commence à servir un mètre de Ricard)
Compagnon – Tu es nouveau ici … ?
Un deuxième homme bien habillé rentre dans le bar. Arrivée depuis le public.
Compagnon – HA !!! Voilà mon maître !
Le Maitre embrasse le Compagnon
Maître –Ta journée s’est bien passée ? tu as fini ton boulot ? prêt pour l’atelier ? on rentre dans 5 minutes.
Compagnon – Oui, ce n’est jamais fini. L’heure du repos n’est jamais arrivée.
Barman, à part – Ils retournent déjà bosser ?… Et il n’a pas pris son mètre…
Il les observe un peu surpris.
Maître – Ha !! (Découvrant le tablier du barman) Un nouvel apprenti !
Barman (à part )– Dix ans de métier tout de même !
Maître – Allez viens que je t’embrasse !!
Imaginer une sorte de ballet en musique, le barman cherchant à éviter le maître qui veut l’embrasser.
Barman (à part )– Le patron m’avait prévenu que les clients du coin étaient plutôt… libres … Par contre, je n’ai pas encore vu les bonnes nurses …
(aux deux FF) – Vous devez être tous les deux des… des habitués ? Vous êtes…
Maître – Moi je suis au 33ème !
Barman – Avec ascenseur ?
Maître – Qu’est-ce que tu veux dire, là ? J’ai grimpé tout seul, moi ! (Au Compagnon)– Qu’est-ce que tu prends ?
Compagnon – Comme toi, Un blanc ! (Ils rient)
Maître – Ne sois pas impatient mon petit ! Finis d’abord ton bleu ! tu as le temps pour les blancs !
Maître (au Barman) – Sers-nous deux blancs ! Deux !
Barman (au compagnon) – Mais votre mètre est servi, là !
Maître – Moi, servi ? Ah ! il a de l’humour cet apprenti ! Alors, ces blancs ?
Barman (à part ) – j’y comprends rien !
Le Barman sort deux verres et une bouteille de blanc et fait ainsi la batterie du rite français.
Les deux frères, lèvent leurs verres :
Maître et Compagnon (ensemble) – Buvons !
Ils tapent trois coups avec leurs verres pleins sur le comptoir avant de le vider cul sec.
Maître – (au compagnon) On ne te voit plus très souvent en ce moment !
Compagnon – Ben, J’ai sauté la dernière tenue…
Maître – Dommage t’as raté une soirée sympa, on a reçu un type, un costaud, une tronche ! Mais quand on l’a assis, les yeux bandés, je peux te dire qu’il ne faisait pas le malin !
Compagnon – Vous étiez nombreux à l’interroger ?
Maître – Oui ! une trentaine, et je peux te dire qu’il s’en est pris des boules noires ! Il est sorti avec les jambes en coton…
Barman (à part) – Des flics ?! je suis dans un commissariat ?
Maître – (au compagnon) Mais tu étais où, alors ?
Compagnon – Chez les Égyptiens …
Maître – (il mime la marche de profil des égyptiens)
Compagnon – Très drôle ! Je ne te parlerais donc pas des Ecossais.
Barman – Vous… vous voyagez beaucoup ? …
Compagnon : Moi ça fait 5 ans que je voyage, j’ai été un peu partout… sauf chez les Anglais.
Barman : Ah bon, pourquoi ????
Compagnon : Ben on n’est pas logé à la même enseigne. Eux travaillent différemment, à la régulière.
Maître – (en soupirant) des réguliers, quoi !
Barman : (à part) – Merde, des Ripoux !
Maitre : Pour moi c’est pareil avec toutes ses visites, ma femme commence à trouver le temps long.
Barman : Votre femme ? Ah bon… (désignant le compagnon) je croyais qu’il était votre… votre… compagnon.
Maitre : Compagnon oui, mais uniquement sur le chantier ! D’ailleurs ma femme ne veut pas que je les amène à la maison !
Barman – Jalouse ?
Maître : et pourquoi serait-elle jalouse ? D’ailleurs elle va bientôt se faire initier chez les femmes.
Compagnon – Ici on ne reçoit pas les femmes.
Barman – Évidemment, je m’en doutais !
Compagnon – (regardant la pendule) Il est midi !
Maitre – Puisqu’il est l’heure et que nous avons l’âge…
Barman – Mais il n’est que 20 heures !
Maitre et Compagnon : (se moquant de ce qu’ils croient être une plaisanterie facile) Ah ! ce qu’il est drôle ! (Ils sortent)
Barman : (resté seul) J’ai pas tout compris là. Mais je crois que je vais rendre mon tablier (il le quitte et sort à son tour)