Le GADLU et la Bible

2 personnages (2,5mn)

Le GADLU se penche sur l’épaule du bouffon qui feuillette un gros bouquin : le recueil des textes d’Hilarion.

GADLU – Que lis-tu là, Bouffon ?
Le bouffon lève la tête, regarde l’intrus et le reconnait :

BOUFFON – Ô vous ? Gadlu ! Je lis là une Bible, le croiras-tu ?

GADLU – Une Bible ? Toi, petit mécréant, qui ne jures que par Satan… ?

BOUFFON – Pour s’élever l’esprit, n’est-il pas toujours temps ?

GADLU – Je me sens las de tes salades ! Montre-moi ce qu’il y a dedans !

BOUFFON – C’est la Bible d’Hilarion ! Elle va faire un carton !

GADLU – Prends garde gamin ! Ne joue pas au plus malin.
Toi et tes histrions, vous allez goûter de mon goupillon !
Le GADLU s’empare du bouquin lit la première de couverture.
Écritures impies !
Il poursuit la lecture et s’exclame après un temps, en jubilant.
Ah !… de midi à minuit, de pavé en pavé, je traînais ma culotte en d’humides popotes,
Et voilà que cette glose opère en moi une métamorphose !
(Un temps)
Des coups les plus pendables je me sens enfin capable.

BOUFFON – Aussi ! que n’avez-vous à votre âge perdu de temps en bavardages,
À briller en clinquaille, fagoté de médailles,
À écouter des planches qui gâtaient vos dimanches,
À chercher des lézards dans des rites barbares.

GADLU– (il soupire) Et que dire aujourd’hui des pétroleuses ?

BOUFFON – Rien que des emmerdeuses !
Le Gadlu se remet à la lecture…

GADLU– Je regrette de n’être point homme pour jouir avec vous de vos mots graveleux.
Ce tome deux me contamine…
(Un temps) Aïe ! ces coups dans ma poitrine !
Il rit en hoquetant

BOUFFON – (à part) Ses hoquets que son rire attise me font craindre une crise.

GADLU– Je souffre le martyre…

BOUFFON– Cessez donc de gémir, je suis inquiet (il lui donne un soufflet).

GADLU– (surpris) Mais pourquoi me tirer ce taquet ?

BOUFFON – c’est pour vous décoincer, Ô spectre vénéré !

Reprenant ses esprits le GADLU repose la Bible et applaudit.
GADLU – Ah que ce fut comique ! j’en ai eu des coliques.

BOUFFON – Je vous donne en présent, GADLU, cette Bible.

GADLU – Elle est vraiment, vraiment trop risible !
(En déclamant) Moi, de Théo l’égal, promis, juré, je te le dis : j’irai au festival !